Je suis surdouée… (et ce n’est pas juste d’avoir des bonnes notes)
Je suis surdouée. En première année, je faisais en 15 minutes ce que les élèves de deuxième année faisaient en une heure. Oui, vous avez raison, je ne suis pas comme les autres. Je l’ai remarqué bien assez tôt.
Je tiens à en parler parce que les gens ont beaucoup de préjugés. Parce que justement, la douance, ce n’est pas juste avoir des bonnes notes. (D’ailleurs plein de surdoués ont des échecs à l’école !). Y a plein de choses qui viennent avec ce diagnostic. Parfois ce sont des troubles de comportement. On s’adapte mal, on s’intègre mal. On suranalyse. Et surtout, on s’ennuie. Beaucoup. Parce que rien n’est jamais assez pour nous. C’est comme si rien ni personne ne nous nourrissait assez. Je me sens toujours en décalage avec les autres. Et les relations avec les autres sont plus difficiles. Petite, je préférais parler à des adultes. Mais le décalage était encore là, bien sûr : c’était un décalage d’âge !
Les gens pensent que l’école est facile pour les surdoués. Ce n’est pas vrai. Premièrement, on se sent différent. On pense différemment. Je me suis fait dire des choses blessantes. Et étonnamment, on ne me félicite pas. Comme si mes bonnes notes ne valaient rien. Mais pourtant, quelqu’un qui a un talent en dessin, on continue de lui dire qu’il est bon. Son talent a de la valeur. Moi, je sens souvent que ça n’en a pas.
Ça peut aussi être épuisant d’être surdoué. Je suis curieuse de tout. Je veux tout apprendre et tout comprendre, tout le temps. Et dans tous les domaines ! Puisque je m’ennuie beaucoup en classe, je réfléchis beaucoup. Parfois, en cours, les réflexions philosophiques dans ma tête vont trop loin ! Je ne sais pas m’arrêter.
Ce qui est épuisant aussi, ce sont les passions.
Des espèces de boulimies de connaissances. Je m’intéresse à quelque chose de façon extrême et soudainement, je m’en désintéresse. Ce sont de véritables montagnes russes. Je peux aussi lire un gros livre par jour pendant des mois et soudainement, ne plus lire du tout. Il paraît que c’est difficile aussi pour l’entourage !
Mais je suis chanceuse, je suis bien entourée. Je sais que je n’ai pas à me freiner pour essayer de rentrer dans le moule. Et j’ai développé de bons outils pour gérer l’ennui.
*nom fictif par souci de confidentialité
Réponse de Benoît Hammarrenger, neuropsychologue :
La douance, c’est une capacité à raisonner, à analyser et à faire des liens supérieure à la moyenne. On remarque aussi un intérêt hors norme pour l’apprentissage. Mais c’est comme un cadeau empoisonné ! La douance vient avec des difficultés significatives, entre autres dans les relations sociales. Le fonctionnement moteur et sportif sera aussi souvent moins développé. Le désintérêt peut aussi nuire aux résultats scolaires. Quand tu déduis la réponse avant que l’enseignant parle, qu’il réexplique la même chose quatre fois, tu deviens vraiment distrait. Tu peux donc être surdoué et ne pas avoir de bonnes notes à l’école.
Ou alors, rendu en 3e ou 4e secondaire, découvrir que la douance n’est plus assez. Qu’il te faut étudier pour la première fois de ta vie… et être complètement démuni.
Je trouve aussi intéressant l’expression de Juliette « boulimie de connaissances » parce que lorsque je parle aux parents, je leur dis toujours qu’il faut nourrir les surdoués ! Ils ont réellement faim intellectuellement et c’est exigeant.
Maintenant, quoi faire si on est surdoué ? S’intéresser à autre chose que ce qui est académique. Pour se développer de façon plus complète. Dans le sport, dans les arts. Chercher de la stimulation dans la pratique d’un instrument de musique ou encore dans la peinture. Les musées ou encore les différents festivals sont aussi intéressants à explorer. Parce qu’on y apprend en participant activement à quelque chose.
Merci d’en avoir parlé tu as sue mettre des mots sur ce que je ressens.