Je suis surdouée… (et ce n’est pas juste d’avoir des bonnes notes)

22 octobre 2019 - Curium

Par juliette*, 15 ans

 

Je suis surdouée. En première année, je faisais en 15 minutes ce que les élèves de deuxième année faisaient en une heure. Oui, vous avez raison, je ne suis pas  comme les autres. Je l’ai remarqué bien assez tôt.

Je tiens à en parler parce que les gens ont beaucoup de préjugés. Parce que justement, la douance, ce n’est pas juste avoir des bonnes notes. (D’ailleurs plein de surdoués ont des échecs à l’école !). Y a plein de choses qui viennent avec ce diagnostic. Parfois ce sont des troubles de comportement. On s’adapte mal, on s’intègre mal. On suranalyse. Et surtout, on s’ennuie. Beaucoup. Parce que rien n’est jamais assez pour nous. C’est comme si rien ni personne ne nous nourrissait assez. Je me sens toujours en décalage avec les autres. Et les relations avec les autres sont plus difficiles. Petite, je préférais parler à des adultes. Mais le décalage était encore là, bien sûr : c’était un décalage d’âge !

Les gens pensent que l’école est facile pour les surdoués. Ce n’est pas vrai. Premièrement, on se sent différent. On pense différemment. Je me suis fait dire des choses blessantes. Et étonnamment, on ne me félicite pas. Comme si mes bonnes notes ne valaient rien. Mais pourtant, quelqu’un qui a un talent en dessin, on continue de lui dire qu’il est bon. Son talent a de la valeur. Moi, je sens souvent que ça n’en a pas.

Ça peut aussi être épuisant d’être surdoué. Je suis curieuse de tout. Je veux tout apprendre et tout comprendre, tout le temps. Et dans tous les domaines ! Puisque je m’ennuie beaucoup en classe, je réfléchis beaucoup. Parfois, en cours, les réflexions philosophiques dans ma tête vont trop loin ! Je ne sais pas m’arrêter.

Ce qui est épuisant aussi, ce sont les passions.

Des espèces de boulimies de connaissances. Je m’intéresse à quelque chose de façon extrême et soudainement, je m’en désintéresse. Ce sont de véritables montagnes russes. Je peux aussi lire un gros livre par jour pendant des mois et soudainement, ne plus lire du tout. Il paraît que c’est difficile aussi pour l’entourage !

Mais je suis chanceuse, je suis bien entourée. Je sais que je n’ai pas à me freiner pour essayer de rentrer dans le moule. Et j’ai développé de bons outils pour gérer l’ennui.

*nom fictif par souci de confidentialité

Réponse de Benoît Hammarrenger, neuropsychologue :

La douance, c’est une capacité à raisonner, à analyser et à faire des liens supérieure à la moyenne. On remarque aussi un intérêt hors norme pour l’apprentissage. Mais c’est comme un cadeau empoisonné ! La douance vient avec des difficultés significatives, entre autres dans les relations sociales. Le fonctionnement moteur et sportif sera aussi souvent moins développé. Le désintérêt peut aussi nuire aux résultats scolaires. Quand tu déduis la réponse avant que l’enseignant parle, qu’il réexplique la même chose quatre fois, tu deviens vraiment distrait. Tu peux donc être surdoué et ne pas avoir de bonnes notes à l’école.

Ou alors, rendu en 3e ou 4e secondaire, découvrir que la douance n’est plus assez. Qu’il te faut étudier pour la première fois de ta vie… et être complètement démuni.

Je trouve aussi intéressant l’expression de Juliette « boulimie de connaissances » parce que lorsque je parle aux parents, je leur dis toujours qu’il faut nourrir les surdoués ! Ils ont réellement faim intellectuellement et c’est exigeant.

Maintenant, quoi faire si on est surdoué ? S’intéresser à autre chose que ce qui est académique. Pour se développer de façon plus complète. Dans le sport, dans les arts. Chercher de la stimulation dans la pratique d’un instrument de musique ou encore dans la peinture. Les musées ou encore les différents festivals sont aussi intéressants à explorer. Parce qu’on y apprend en participant activement à quelque chose.

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3 réponses à “Je suis surdouée… (et ce n’est pas juste d’avoir des bonnes notes)”

  1. Arel dit:

    Merci d’en avoir parlé tu as sue mettre des mots sur ce que je ressens.

  2. Floflo dit:

    Je me reconnais tellement dans cet article (je n’ai jamais été diagnostiquée par contre)! Le décalage avec les autres c’est vraiment épuisant. J’ai aussi l’impression que toutes les personnes ont les normes sociales écrites dans leur ADN, tandis que moi, je sais à peine comment démarrer une discussion intéressante. Courage à tous et à toutes! 🙂

  3. Anonyme dit:

    Je te comprends tellement Juliette! En fait, pour les «aptitudes sociales», j’ai eu beaucoup de chance : mes parents ont su que j’étais surdouée dès que j’étais petite, puisque je m’intéressais à tellement de choses vraiment intensément. Je dévorais des livres et des livres pour comprendre le monde dans son entièreté et je pétais une crise 😳😝 chaque fois que je ne trouvais pas la réponse. Soit parce que c’était un genre de tabou (ex. d’où viennent les bébés?😂) ou c’était trop philosophique et profond (ex. comment à commencé le monde?). Donc j’ai commencé à ma troisième année du primaire dans une « école de surdoués » (programme enrichi et accéléré 🤓). J’ai été chanceuse pour mon manque d’attention puisque mes profs étaient spécialisés. Ils expliquaient la matière et si on comprenait déjà, on pouvait commencer à faire les exercices. Ils nous laissaient soit lire un livre, soit dessiner, ou soit (mon préféré) faire notre « plan de travail » qui était beaucoup de feuilles d’exercices traitant de différentes matières. On pouvait les faire dans l’ordre qu’on voulait et même laisser un exercice à moitié fini pour en commencer un autre (ce que je fais aussi beaucoup avec des livres ou des grands projets). Mes parents me proposaient beaucoup d’activités enrichissantes. En plus je vis à 5 minutes de marche de un « AGORA » où il y a beaucoup d’activités différentes et (wait for it) UNE BIBLIO!!!

    P.S. Quelques mauvais côtés :

    1.Je me perds souvent dans mes pensées et peux rester dans un genre de « coma » lorsque je suis trop deep.
    2.Je me suis fait intimider quelques fois puisque certains sont jaloux 😁 et j’adorais les maths et la majorité des gens ça leur fait peur 😢 donc encore de la jalousie.
    3.Comme tu dis, lorsque j’ai plein de bonnes notes on ne me dit rien puisque « c’est normal pour toi »(Avoueeeeeee!)
    4.Et je peux soit parler/écrire pendant DES HEURES (en fait j’écris un livre donc il y a du positif! 😄)

    AUSSI, je me mettais un max de pression pour avoir des bonnes notes jusqu’à ce que j’aille consulter la TTS (technicienne en travail social) de l’école et qu’elle m’explique que j’essayais trop d’être parfaite!(je me mets quand même un peu de pression…)

    Merci de m’avoir lu et svp,svp,svp réponds!