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Être un homme en 2024

22 avril 2024 - Philippe Marois

Être un homme en 2024, ça veut dire quoi? Pendant longtemps, il ne semblait y avoir qu’un seul modèle sur le marché : un moteur puissant, capable de surmonter tous les obstacles. Mais depuis quelques années, une foule de nouvelles possibilités font leur apparition. Sensible, intello, artistique… On dit aux jeunes hommes qu’ils peuvent être tout ce qu’ils veulent. Il suffit de choisir, et c’est tout? Est-ce si simple?

Il était une fois, l’Homme

La masculinité a longtemps porté l’étiquette de la virilité.

Un « vrai » homme, c’était travaillant, musclé, protecteur et idéalement capitaine d’une équipe de football. La définition était aussi très axée sur les interdits : pleurer, faire preuve de délicatesse et se mettre du vernis à ongles!

On peut avoir l’impression que cette manière d’être est innée chez les hommes. Or, c’est une construction sociale, c’est-à-dire un stéréotype dicté par la société. La preuve, c’est que la masculinité varie selon les époques et les cultures.

Porter des jeans ou manger des côtes levées, ça ne fait pas partie du code génétique naturel des mâles. C’est plutôt la société moderne qui apprend aux gars, dès leur plus jeune âge, à jouer le personnage de l’homme fort. Et que si on n’atteint pas ce standard, on est «inadéquat», voire «inférieur».

Au Moyen Âge, la couleur rose est associée à la virilité. Après tout, c’est un dérivé du rouge, symbolisant alors la puissance et la guerre!

Aux 17e et 18e siècles, le roi français Louis XIV représente l’apogée de la masculinité. Il porte des collants, de la broderie et des souliers à talons hauts avec de jolies boucles. Tous les hommes rêvent de lui ressembler.

En Arabie saoudite, en Afrique et au Japon, les hommes portent quotidiennement des robes ou des jupes.

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Traditionnel ou toxique?

Ce modèle traditionnel, est-il ce qu’on appelle «la masculinité toxique»? Pas du tout!

Selon Jean-Martin Deslauriers, professeur à l’École de travail social de l’Université d’Ottawa, le modèle de l’homme fort comporte plusieurs points positifs. Il encourage le dépassement de soi, l’entraînement physique, la protection des autres… «Des gars qui veulent incarner ces valeurs, la société en a besoin!»

Mais tous les gars n’ont pas à être comme ça. Voilà le message clé. Mais ce n’est pas si simple!

Même si on vous répète que vous pouvez exprimer votre personnalité de mille façons, la pression du modèle traditionnel prévaut toujours, selon Jean-Martin Deslauriers. «On entend encore des moqueries du genre “ Arrête de faire ton faible! ”.»

C’est un problème. D’abord, pour tous les gars (jeunes et moins jeunes) qui refoulent leur véritable personnalité pour se fondre dans le moule.

Ensuite, parce que ce modèle contraint à camoufler ses émotions et à ravaler ses larmes.

«C’est bien d’être fort, mais il faut aussi savoir demander de l’aide, explique le professeur. Même un char d’assaut a parfois besoin d’aller au garage»!

Un problème de santé mentale, c’est comme une blessure sportive. Si on ne s’en occupe pas rapidement, ça guérit mal et on en subit les conséquences longtemps.

MASCULIN PLURIEL

La masculinité se transforme lentement, mais sûrement. Les études montrent que les jeunes hommes d’aujourd’hui sont plus soucieux de leur santé que l’étaient les générations précédentes. Les pères participent davantage aux tâches familiales, traditionnellement associées aux femmes.

Le travail demeure une valeur importante, mais principalement pour l’épanouissement personnel. L’homme pourvoyeur, qui soutient financièrement sa famille, perd du terrain.

Selon Gilles Tremblay, professeur retraité à l’École de travail social et de criminologie de l’Université Laval, «les nouvelles générations d’hommes sont plus à l’aise de parler de leur vécu, mais quand ça va mal, ça demeure difficile de demander de l’aide». Certains stéréotypes masculins sont coriaces!

Le piège du masculinisme

 

MASCULINISME : idéologie qui se préoccupe de la condition des hommes, bien souvent par opposition au féminisme. Le message de la plupart : il faut résister à la domination des femmes. #mouais…

Plusieurs influenceurs en ligne, dont le controversé Andrew Tate, associent cette évolution de la masculinité à une dérive. Selon eux, la redéfinition en cours dénature l’homme, qui devrait demeurer fort et dominant. La multiplication des modèles mélangerait les gars. Ceux-ci ne sauraient plus à qui s’identifier, ils perdraient leurs repères, ce qui expliquerait les taux de suicide plus élevés chez les hommes que chez les femmes. Grave erreur! Selon les recherches, c’est justement la pression de paraître invulnérable qui entraîne beaucoup de détresse chez les hommes.

N’empêche que les discours masculinistes séduisent de nombreux internautes : «Une grosse partie de leur message est d’étaler un mode de vie luxueux, observe Pauline Hoebanx, doctorante en analyse culturelle et sociale à l’Université Concordia. On dit aux hommes qu’en étant égocentriques et compétitifs, ils arriveront à avoir trois voitures de sport et une montre Rolex.»

Bien sûr, cette abondance matérielle peut être alléchante. Mais ce n’est qu’un mirage. «Ce style de vie reste inatteignable pour la majorité, poursuit Pauline Hoebanx. Ça crée un sentiment de vide constant chez ceux qui écoutent ces influenceurs, comme s’il leur manquait toujours quelque chose.»

En d’autres mots (attention, #métaphoredechar), sous le capot rutilant de ce modèle masculin, il manque de nombreuses pièces pourtant indispensables.

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Forcer le respect

Autre (gros) problème : les masculinistes perçoivent souvent les femmes comme une menace, un frein au succès des hommes. Selon eux, les acquis féministes se font aux dépens de l’épanouissement masculin. Leur solution (misogyne à souhait)? Écraser les femmes pour assurer leur propre réussite.

Des intervenant·e·s en travail social mettent toutefois en garde contre l’usage
abusif de l’expression «masculinité toxique», qui peut laisser penser à tort que la masculinité traditionnelle est par défaut toxique. Ce qui n’est pas le cas.

«Ça fait en sorte que les gars qui s’identifient au modèle de l’homme fort se sentent jugés et incompris, dit Jean-Martin Deslauriers. Ils peuvent alors se réfugier chez les influenceurs et se radicaliser.»

Dénoncer la mentalité toxique propagée par Andrew Tate et ses comparses, assurément. Mais il ne faudrait pas conclure qu’il est malsain pour un homme de vouloir être fort, ambitieux ou performant.

Un modèle sur mesure

Alors, comment être un homme en 2024? La réponse est relativement simple : soyez ce que vous voulez!

Plus que jamais, vous avez accès à différents modèles. Explorez les possibilités, partez d’un modèle qui vous plaît et ajoutez les options qui vous ressemblent. Vous bricolerez ainsi votre propre masculinité, comme un char monté(dernière métaphore, promis!).

Vous pouvez jouer au football ET porter du vernis à ongles. Vous pouvez être fort ET demander de l’aide au besoin.

Ce ne sera pas nécessairement facile. Par moments, la pression sociale sera lourde. C’est normal : certains changements sociaux prennent du temps à se concrétiser. Mais faites-vous confiance et assumez-vous.

Faire des choix pour soi, c’est souvent plus compliqué que de se conformer au modèle. «C’est vrai, reconnaît Gilles Tremblay, mais c’est aussi plus sain. Ça ouvre tout un champ de possibilités.»

Des possibilités incluant celle de l’homme viril. Tant que vous l’adoptez dans le respect de vous-mêmes et des autres!

Vox pop 100% gars

C’est quoi être un homme?

  • «C’est juste d’être un humain.»
  • «Pour moi, il n’y a pas vraiment de modèle à suivre, on est plutôt libre, tant qu’on fait preuve d’intégrité et qu’on respecte ses émotions. Je me sens masculin quand je suis capable d’entretenir des relations amicales avec des personnes des deux genres.»
  • «J’ai l’impression que, pour mes amis masculins, je ne suis pas un vrai homme si je n’entre pas dans un concours de « Qui est le plus viril? ». Tandis que pour les filles, je ne suis pas un vrai humain si je ne m’ouvre pas sur mes émotions.»
  • «Une personne avec un sexe masculin. Moi, je ne fais pas partie du stéréotype « macho musclé », mais je crois que c’est correct de suivre ce modèle-là aussi.»
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