L’envers du décor
20 mai 2022 - Miriane Demers-Lemay
Vous rêvez de découvrir d’autres cultures, sans nuire à l’environnement ou aux populations locales ? C’est possible ! Cependant, les cartes postales paradisiaques dissimulent souvent des côtés moins ensoleillés.
Sous le soleil de Majorque
Soleil, plages dorées et eaux turquoise. Majorque est une destination tropicale de choix pour les touristes en quête de détente. Pas surprenant que l’île espagnole de la Méditerranée ait orienté son économie vers le tourisme de masse, à l’instar de Cuba, du Mexique, de la République dominicaine ou de la Thaïlande.
« L’été, il y a des voitures partout, dit Neus Torrens, une adolescente qui habite sur l’île. De belles plages comme Magaluf sont maintenant remplies d’hôtels. Des touristes viennent faire la fête, sans aucun respect pour l’endroit et la population locale. Les prix augmentent pour nous, les résident·e·s. Le tourisme de masse, ça réduit notre qualité de vie. C’est triste de voir à quel point l’île se détériore. »
La bonne nouvelle
Heureusement, Majorque tente maintenant de développer un tourisme plus écologique et durable.« Je vois que ça change à très petite échelle », observe Neus. Des bornes de recharge pour les voitures électriques ont été installées sur l’île. Des touristes embarquent sur des petits bateaux traditionnels, parcourent des sentiers de randonnée, font du cyclotourisme, visitent des fermes ou vont observerles oiseaux dans les marais. Des activités moins dommageables.
Nomadisme numérique
Avant la pandémie, Karine Poirier voyageait tout en travaillant à distance. La traductrice de métier a ainsi visité l’Asie du Sud-Est, l’Europe, les États-Unis et l’Amérique du Sud. Elle est une « nomade numérique ». Des endroits comme Chiang Mai en Thaïlande, ou Bali en Indonésie, sont devenus extrêmement populaires auprès des adeptes de ce mode de vie. Sur le plan personnel, Karine Poirier a adoré l’expérience, qui l’a transformée : « Je n’ai plus peur de l’inconnu, je sais que je vais pouvoir gérer. »
Karine Poirier reste toutefois critique : ce mode de vie peut avoir des effets négatifs sur la population locale. Quand les nomades numériques monopolisent les auberges internationales, ils privent la région des revenus touristiques habituels. Si ces personnes optent pour Airbnb, le prix des logements monte en flèche. La population locale doit se serrer la ceinture ou déménager. Depuis la pandémie, Karine est retournée vivre à Montréal pour se rapprocher de ses ami·e·s et éviter de propager le virus. Elle espère toutefois renouer avec son ancien mode de vie quelques mois par année, et de façon réfléchie !
Le piège instagram
Sous l’arche rouge du sanctuaire shinto à Hakone, au Japon, un jeune couple contemple le lac et la forêt. La photo, qui évoque la paix et la nature, est publiée sur Instagram avec des mots-clics comme #beautifuldestination et #japantravel.
Ce qu’on ne montre jamais, ce sont les dizaines de personnes en file derrière la photographe. Elles attendent pendant des heures pour prendre le même cliché, publié sur les mêmes réseaux sociaux !
Plusieurs touristes courent d’un point de vue «instagrammable» à un autre, sans se soucier des plantes piétinées ou de la population locale. Les Rocheuses canadiennes comptent plusieurs de ces endroits particulièrement photogéniques, dont Joffre Lakes, qui a subi des dommages écologiques en raison du tourisme.
C’est bien connu, les trajets en avion ont une lourde empreinte carbone (voir article ici). Mais sur place, les touristes polluent aussi. Ils génèrent beaucoup de déchets et consomment de grandes quantités d’énergie (l’électricité pour la climatisation, par exemple), d’eau (puisée dans les nappes phréatiques) et de nourriture (souvent importée de l’extérieur). Au Royaume-Uni, les hôtels produisent chaque année 79 000 tonnes métriques de déchets alimentaires, l’équivalent en poids de huit tours Eiffel !
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