Lâchez-moi avec la carrière!

23 octobre 2023 - Curium

L’autre soir, au centre sportif, un vieil homme a commencé à me parler. Il devait être neuf heures et demie : tout le monde partait. J’étais en compagnie de mon amie. Lui attendait sa femme. Je l’ai écouté. Il connaissait des membres de ma famille. Après une minute ou deux, il m’a demandé, avec insistance, ce que je voulais faire dans la vie. J’ai répondu que je ne savais pas.

Il m’a dit d’un ton assez abrupt : «Tu ne sais pas quoi faire de ta vie? Tu es en quoi, secondaire 4? Tu devrais.»

Je n’étais pas fâchée, j’avais plutôt un sourire en coin — intérieurement, disons. Parce que j’étais certaine depuis le début qu’il allait me sortir quelque chose du genre. Il a poursuivi : «Ça ne te tente pas d’être ingénieure? De faire des ponts, des routes? Mon fils fait ça, il est très brillant, il fait beaucoup, beaucoup d’argent…» Puis il a continué en vantant son fils de manière exagérée.

J’avais l’impression qu’il lui avait mis énormément de pression. No joke. C’était dans sa façon de parler — tendue, sèche, sans faille. Tout à coup, j’avais l’impression d’avoir été projetée dans une série sur la monarchie anglaise. Genre, on s’est trompés d’époque, là!

Une pancarte où l'on peut lire OK Boomer!
Dreamstime

 

Moi, je veux voyager, avoir du fun, rencontrer plein de monde, prendre le temps d’apprécier ce que la nature m’offre, la magnifique planète qui nous est donnée. Aider les gens, les faire rire, faire du bénévolat pour nettoyer les océans, apprendre des milliers de choses, faire du sport, écrire des sketchs qui me font cramper à en avoir mal au ventre, danser, rire, m’entraîner… Pis si j’ai un travail, je veux tripper. Ou au moins avoir des histoires intéressantes à raconter après!

Je ne sais pas quoi faire comme études, c’est vrai, mais je sais que je ne veux pas m’enfoncer dans une voie qui, à la longue, va me ternir et perdre tout intérêt à mes yeux. Il faut que je me donne le temps de découvrir ce qui m’intéresse, ce qui m’allume réellement. Pour suivre une carte, il faut d’abord connaître le relief du paysage.

Évidemment qu’un minimum d’argent est nécessaire, mais il faut s’écouter. On n’a qu’une seule vie. Il ne faut pas la gâcher ni vivre dans l’angoisse. (Parole d’une grande anxieuse.) Go with the flow. Fais ce qui te passionne, ce qui te donne vie.

«Old style bitch», a dit mon amie quand l’homme est parti.

Tellement.

Ima (nom fictif)

Vous voulez répondre? Vous avez une histoire à raconter?

La réflexion de Geneviève Beaulieu-Pelletier, psychologue :

Décider de ce qu’on va faire comme études ou comme travail, ça ne se fait pas en claquant des doigts! C’est un processus. Il n’est pas nécessaire de le savoir dès le secondaire. Comme le dit si bien Ima, il faut se donner le temps de découvrir ce qui nous fait vibrer.

On peut commencer par identifier nos intérêts et oser vivre des expériences qui nous permettent de les explorer. On peut aussi réfléchir à la manière d’intégrer les valeurs qui sont importantes à nos yeux dans notre profession future (avoir par exemple un horaire flexible pour investir dans sa famille ou pour s’adonner à un passe-temps créatif).

Ensuite, on tentera de reconnaître ce qui alimente notre réflexion sur un choix de carrière. Si on choisit par plaisir ou parce que c’est un domaine important pour nous, notre motivation sera plus soutenue.

Alors que si on sélectionne en fonction du salaire ou parce qu’on ressent de la pression (attentes des parents, regard social, culpabilité, peur de décevoir), cela risque d’affecter notre motivation et notre bien-être.

Idéalement, nos études et notre emploi devraient nous nourrir psychologiquement. Pour ce faire, il est essentiel de satisfaire ces besoins fondamentaux :

Autonomie : sentir qu’on est à la source de nos choix, qu’on s’engage librement ;
Compétence : se sentir efficace ;
Affiliation : faire partie d’un groupe

Quand on répond à nos besoins psychologiques, on ressent plus de plaisir dans notre travail. À l’inverse, quand nos besoins ne sont pas satisfaits, on risque de perdre de l’intérêt. On peut aussi développer des symptômes psychologiques ou se sentir moins bien.

Ima identifie d’ailleurs plusieurs éléments qui pourraient satisfaire ses besoins. Par exemple, elle aimerait faire quelque chose qui la passionne, apprendre, rencontrer des gens, les aider, faire du bénévolat, écrire des sketchs efficaces. Ce sont des indices précieux à écouter.

Gardons en tête que l’idée est de se créer un emploi à son image. Ainsi, il aura plus de chances de nous satisfaire!

Lire plus d’histoire d’ados.

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