SLM: Curium rencontre Simon Boulerice
Résumé: L’enfant mascara raconte l’histoire d’un jeune garçon troublé dans son identité de genre qui se fait tuer pour des raisons homophobes. C’est un roman que je qualifierais de choquant, différent et paradoxal… En quelque sorte. Chose certaine, il en sensibilisera plus d’un. On s’attache rapidement à Larry/Leticia en raison de sa personnalité extravagante, de sa capacité à tout voir positivement et de sa manière spéciale d’apprécier la vie. Il est épris de Brandon, un garçon avec qui il va à l’école, mais ce n’est pas réciproque.
Le paradoxe de cette histoire se trouve dans la manière dont elle est racontée. C’est fait du point de vue de Larry, qui ne semble pas se rendre compte de ce qui se passe réellement. Il raconte tout à la légère. Ça ne tombe donc pas trop dans le mélodramatique. Mais, le hic, c’est que nous, nous savons ce qui se passe réellement. Alors le contraste entre la légèreté de Larry et la gravité de la situation est ultra frappant. Et c’est ce que j’ai préféré de ce roman. J’ai aussi aimé le fait que tout au long du livre, Larry s’adresse directement à Brandon. C’est différent de la narration type du JE ou de la narration extérieure. Et ça nous déstabilise encore plus. J’ai apprécié que certaines autres personnes témoignent au cours du roman, qu’on connaisse leur opinion du le sujet.
On entend souvent parler de l’homophobie, mais jamais je n’ai lu quelque chose qui m’a aussi bien fait comprendre la situation, comment une personne victime de ça peut se sentir. On dirait que, puisque c’est inspiré d’une histoire réelle, ça rend le roman beaucoup plus concret, même si une grande partie reste de la fiction.
Le style d’écriture de Simon est vraiment agréable à lire. Il est à la fois simple et poétique. Ayant seulement 184 pages, il constitue une lecture parfaite pour les lecteurs de tous les niveaux, mais étant ouverts d’esprit.
ENTREVUE:
C’est une histoire extrêmement triste, mais puisqu’elle est racontée par Larry, qui prend ça un peu à la légère, ça diminue l’ampleur de la situation. Expliquez-moi comment vous avez fait pour garder un équilibre entre les deux tons?
SB : Je trouve que la vie est complexe; elle est drôle et triste en même temps. Mes personnages vivent souvent des choses dramatiques, mais y font face avec de l’humour et de l’ironie. Larry vit vraiment quelque chose de dramatique, en plus des problèmes familiaux auxquels il fait face. Alors, il y a des éléments heureux comme son amitié avec plusieurs filles, son talent pour le chant et sa grande curiosité afin d’équilibrer le tout. De plus, Larry avait une arrogance, une prestance qui me plaisait, il était confiant et ne se voyait pas du tout comme une victime. Avant, je n’étais vraiment pas comme lui, alors ça m’a impressionné.
Est-ce que la personnalité du personnage de Larry est inspirée de celle du vrai Larry? (Puisque c’est inspiré d’un fait vécu)
SB : J’ai fait énormément de recherches et je me suis inspiré des différents articles et photos sur lesquels je suis tombé. Aussi, je m’étais fait une image de comment était son entourage, mais un documentaire produit au cours de mon écriture m’a permis de mettre un visage sur ces personnages, de m’ajuster à certains niveaux et de confirmer certains éléments. De plus, me rendre à l’école où la vraie histoire s’est déroulée m’a beaucoup aidé à bonifier le roman et à me rapprocher le plus possible de la réalité.
Pour ma prochaine lecture, quel autre roman de vous me suggérez-vous? Et pourquoi?
SB : Jeanne Moreau a le sourire à l’envers, parce qu’il est plus doux que L’enfant mascara. C’est encore une narration à la première personne, on est dans la tête de quelqu’un. Le personnage est beaucoup moins flamboyant que Larry et il s’appelle Léon. Son drame à lui est de ne pas avoir de drame. Il vit dans une famille un peu typique. Il se retrouve face au dilemme de ressembler soit à son grand frère, intelligent, ou à son meilleur ami, plus sportif. Puis, il réalisera que son grand frère est anorexique. Et Léon ne veut pas l’accepter malgré qu’il soit bon, gentil et que ce ne soit pas dans sa nature de juger. Dans la tête de Léon, l’anorexie est une maladie féminine. Ce n’est pas parce qu’il veut mal faire, c’est juste que c’est une manière de penser qui est en lui. Alors, le livre porte vraiment sur les préjugés qui sont ancrés en nous.
L’enfant mascara ferait un bon film, même si ce serait un défi de mettre les réflexions de Larry en image…
SB : En fait, la première version de L’enfant mascara était une pièce de théâtre. Je voulais jouer avec l’univers de cupidon, puisqu’il est mort la journée de la St-Valentin. Mais finalement, ça ne prenait pas forme en théâtre. Alors j’ai décidé d’en faire un roman. Mais je me dis toujours qu’une bonne histoire peut vivre de mille façons. Et la même histoire sous une forme différente peut aller rejoindre des personnes complètement différentes.
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