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Je ne suis pas féministe

18 juin 2018 - Curium

 

 

Par Éloïse, 16 ans. (Nom fictif)

 

Il y a quelques semaines, un atelier de sensibilisation sur la situation des femmes au Québec nous a été présenté à l’école. Les deux présentatrices, des  jeunes femmes intéressantes et engagées, nous ont partagé des statistiques, nous ont rappelé que les stéréotypes genrés étaient encore d’actualité et ont bien sûr abordé le sujet des agressions sexuelles. Je ne m’en cache pas, j’ai trouvé que c’était pertinent, bien qu’il y ait eu plusieurs points sur lesquels je n’étais pas d’accord ou que je considérais différemment.

Leur présentation terminée, mes amies et moi avons discuté de ce que nous en pensions. C’est alors que j’ai dit ce qui a suscité des réactions enflammées :

Je ne suis pas féministe.

Oh ! Hurlements d’indignation, cris d’épouvante, sourcils qui se froncent et mâchoires qui se décrochent !

Eh, minute ! Je suis pour l’égalité des sexes, aucun doute là-dessus. Je suis même profondément outrée de la situation des femmes dans plusieurs pays tels l’Arabie, ou même de celle des Québécoises de 1950. Devant une telle injustice, je suis prête à m’indigner et à me battre pour l’égalité.

Bon, ben t’es féministe alors, diront certains. Non. Je considère que la situation des femmes au Québec d’aujourd’hui, et j’insiste sur cette précision, ne donne pas lieu de brandir des drapeaux revendicateurs ou de déplorer avec énergie certains chiffres en faveur des hommes. Certes, je ne suis pas encore sur le marché du travail, mais néanmoins jamais dans ma vie j’ai eu l’impression qu’on m’infériorisait ou que certains privilèges m’étaient inaccessibles en raison de mon sexe.

Oui, oui, je sais, il y a moins de femmes que d’hommes au Parlement et notre salaire moyen est plus bas que celui de nos homologues masculins.
Et après ?

Je me sens libre d’aller en politique si je le souhaite. Je peux à tout instant choisir une carrière qui me promet un revenu élevé qui, à travail égal, est égal à celui des hommes. Devenir électricienne ou mécanicienne, bien que cela soit des métiers davantage associés aux hommes, ne m’est nullement interdit. Je ne me sens pas du tout opprimée ou mal représentée, au contraire !

Je ne ferme pas les yeux sur les inégalités d’aujourd’hui dans notre société. Toutefois, je préfère m’identifier ou me soucier de problèmes plus importants défendus avec moins de vigueur et de passion ; les autochtones ou la nature, par exemple. Alors je n’ai pas honte de le dire : Je ne suis pas féministe.

Réflexion
Au Québec, les femmes ont fait des avancées considérables. Dans ce cadre-là, évidemment elles ont le bénéfice de pouvoir s’accrocher à une illusion d’égalité. Pourtant, Eloïse réalise qu’il y a encore des inégalités.
(Moins de femmes au Parlement, écart de salaire, etc.) Mais elle dit ne pas les ressentir dans sa vie à elle. Or, il faut prendre conscience de l’étendue des effets de ces inégalités.

Il y a encore beaucoup de personnes qui se fient sur leur expérience personnelle pour contrer les conséquences d’un système inégalitaire. Ça me fait penser au célèbre : « il suffi t de vouloir pour pouvoir ». Dans une certaine mesure, elle croit que cette situation ne la touchera pas, grâce à une pensée positive, de l’ambition, etc. Pourtant, elle le dit elle-même : elle n’est pas encore sur le marché du travail.

Il y a aussi cette définition du féminisme comme un mouvement revanchard. Elle, comme plusieurs, redoute qu’être féministe entraîne des effets négatifs. Elle ne veut pas être perçue « en guerre contre les hommes. » Alors que le féminisme a une large palette : du radical au néo-libéral ! Le féminisme, c’est vouloir l’égalité des sexes ! (Ce qu’elle réclame.) Je regrette donc de lui annoncer qu’elle est féministe… sans le savoir. 😉

Francine Descarries, professeure de sociologie et directrice scientifique du réseau québécois en études féministes propose cette réflexion

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4 réponses à “Je ne suis pas féministe”

  1. Anonyme dit:

    En effet, je remarque une pression sur les femmes et les gens de gauche de s’associer au mouvement féministe, alors que son utilité est « discutable ».

    • Anonyme dit:

      Bruh, personne t’oblige à penser que les femmes sont égales aux hommes, si tu veux être misogyne, je te jure que t’as le droit

  2. chemaeya dit:

    Bravo la moraline à deux francs 👍

    Donc je résume :

    – Vous infantilisez une femme en lui disant qu’elle sait pas de quoi elle parle alors qu’elle visiblement questionné le sujet. ça fait un peu  » ferme là jeune padawan ». Pour le coup si c’était un homme qui avait fait ça, j’aurais pu parler de manplanning (ou mesplication)… peut-on parler de feminism-planning?)

    – Vous insinuez qu’elle est trop jeune et inexpérimentée (ça va le jeunisme ? du validisme bientôt aussi ?), chose que vous ne feriez sûrement pas si elle avait le discours inverse où vous vous extasieriez sur sa clairvoyance précoce. Ironie quand tu nous tient 😆

    Et pour terminer, vous prétendez mieux savoir qu’elle ce qu’elle ressent et elle pense, en lui donnant l’injonction suprême : « tu seras féministe ma fille !  » 😳

    Vraiment, si cette jeune Eloïse de 16 ans est féministe malgré elle, je suis désolée de vous apprendre « Madame Francine Descarries, professeure de sociologie et directrice scientifique du réseau québécois en études féministes » que vous, vous êtes loi de l’être. 🙄

    • Curium dit:

      C’est le rôle de l’expert, dans cette tribune, de jeter un regard analytique. Il ne s’agit donc en aucun cas de moralisme. Elle ne fait ici qu’expliquer les faits: être féministe, c’est être pour l’égalité des sexes. Tout simplement. 🙂