Incursion dans le dark web
Caché dans les profondeurs digitales, le dark web est dépeint comme un dangereux repaire de gangsters.
Le web visible – celui que vous utilisez tous les jours – ne représente que 5 % de la toile. Tout le reste est un immense terrain de jeu anonyme qui englobe tout ce qui n’est pas indexé par Google, Bing et compagnie.
Mêle-toi de tes oignons !
Pour percer les secrets de cette toile sombre, il faut un logiciel spécial. Le plus connu ? C’est Tor (pour The Onion Router). La référence à l’oignon n’est d’ailleurs pas un hommage à Ricardo. Il s’agit plutôt d’un clin d’oeil aux routeurs de Tor, organisés en pelures d’oignon.
Sur le web standard, c’est toujours le chemin le plus court qui est utilisé. Avec Tor, votre trajet devient plus long. Même si vous êtes dans votre chambre à Montréal, votre point d’entrée sur le web sera, par exemple, une adresse IP à Barcelone pour ensuite passer par Moscou et sortir à San Francisco quand vous aurez terminé. Personne ne sait où vous êtes réellement.
« Tor assure l’anonymat de ses utilisateurs en envoyant les informations d’un noeud à l’autre, d’un continent à l’autre, illustre Jean-Philippe Décarie-
Mathieu, chef de la cybersécurité chez Commissionnaires. Remonter le filon est donc très difficile. Les informations se trouvent cryptées. Le logiciel modifie constamment l’adresse IP de l’ordinateur utilisé. »
Comme les sites ne sont pas indexés, il faut aussi connaître l’adresse exacte pour y accéder… Pas un mince défi de mémorisation : Ex : kzmmppsktytt=llmnb$$$cdsqq.onion
On peut récupérer des adresses sur des forums, entre initiés, ou grâce à des annuaires comme The Hidden Wiki, le wiki caché.
Qui va sur le dark web ?
La force de ce territoire, c’est de préserver au mieux la vie privée. Mais qui dit anonymat dit activités illicites… Ici, un supermarché de faux documents. Par-là, un site de contrefaçons de marques de luxe. Et des ruses toujours plus sophistiquées pour effacer les preuves. Au royaume de l’escroquerie, les transactions se règlent en bitcoins, beaucoup plus difficiles à retracer !
Si le dark web attire son lot de hors-la-loi, deux millions d’utilisateurs par jour ne baignent pas dans le gangstérisme. Au contraire…
Le dark web est une terre d’asile pour…
- Ceux qui souhaitent contrer la censure de certains régimes oppressifs. Tor est utilisé en Chine, par exemple. C’est le seul moyen de communication en ligne à l’abri des regards indiscrets.
- Les journalistes d’investigation qui doivent échanger des informations sensibles en toute sécurité.
- Des militants prônant le libre-partage du savoir, avec des projets comme The Tor Library ou Imperial Library.
Donc, on parlerait de toile sombre non pas parce qu’elle est glauque, mais parce qu’elle évoque le dernier recoin du web où on peut avoir la paix, sans être épiés par les géants de la Silicon Valley !
«La solution n’est pas de bannir, affirme Anne-Sophie Letellier, codirectrice des communications chez Crypto.Québec. Il existe du contenu choquant dans le dark web, tout comme il en existe dans le web normal. Les mêmes règles de sécurité s’appliquent. »
Selon la spécialiste, naviguer avec Tor peut même devenir un bon outil de compréhension du web : « Constater que notre Google est en russe, parce que notre noeud de sortie Tor était à Moscou, ça permet d’apprendre la mécanique du web de façon très concrète… »
C’est pas moi je le jure !
Les lois sont plus difficiles d’application dans le dark web. Mais le territoire se trouve quand même dans le viseur des services de police, comme en témoignent de nombreuses arrestations. Le dark web n’est pas une cape d’invisibilité qui vous donne le droit de tout faire.
Top 3 provenance des utilisateurs de Tor
1. États-Unis
2. Russie
3. Allemagne
Le Canada est en dixième position.
Texte : Julie Champagne
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