Des ados techno au service des profs!

24 août 2020 - Curium

Quand j’arrive dans la salle du Collège Ville-Marie, ils sont déjà tous là, blaguant de bon cœur. Leur mandat? Intervenir en cas de problèmes techno à leur école. C’est à eux que les profs font appel. Les écrans qui freezent, les mauvaises connexions, le son qui fonctionne pas… Who you gonna call? Eux autres.

Ma première observation : le nombre impressionnant de recrues de première secondaire. Le « vétéran » Oni, membre depuis les tout débuts, m’explique : « C’est toujours important de recruter des nouveaux. On veut que les premières secondaires apprennent ce que nous avons appris dans ce programme-là, pour pas que ça se perde quand on sera plus là l’année prochaine!, lance le finissant. Notre équipe, c’est un partage des connaissances. C’est pour ça qu’on a autant de fun ensemble. On crée des amitiés inter-niveaux. Pour moi, ça aussi c’est précieux. »

« Moi j’ai été surprise de voir que nous n’étions pas nombreuses de filles » lance la toute menue Anaïs, recrue de première secondaire. De prime abord, on ne pourrait jamais penser que la jeune fille adore ouvrir les ordinateurs en deux. Et pourtant. « Moi, mon frère parlait beaucoup de ce club à la maison, ajoute sa copine Naïma. Pis il se censurait devant moi! Alors je me suis inscrite pour apprendre par moi-même. » Et toc.

Considèrent-ils les adultes techno-nuls? « Pas tous » répondent-ils en chœur. Mais on sent que les appels à l’équipe sont quand même fréquents dans l’école. « C’est souvent les mêmes problèmes qui se répètent, explique Oni. Le son ne fonctionne pas. L’affichage est déficient. Le screen est freeze. La connexion est mauvaise ou on cherche la mauvaise source… »

Louis ajoute : « Dans nos familles, on le remarque surtout chez les grands parents » Le groupe acquiesce en riant. « Ma grand-mère a beaucoup d’appareils électroniques mais elle ne sait pas s’en servir, témoigne Naïma. Elle a peur qu’il arrive quelque chose à ses appareils. Nous, on aura pas peur d’essayer des choses. Dans les films, la technologie contrôle le monde. Ils ont peut-être cette impression. On sait aussi qu’une commande, ça s’annule! »

« Il y a aussi une peur de la technologie ou des écrans, affirme le grand Miro. Chez moi, on dit beaucoup lâche ton cell, lâche ton ordi. À partir de secondaire 3, tous les travaux ou presque sont sur l’ordi. Après, si on veut se détendre, pis que c’est encore sur l’ordi, ben… on dirait qu’on est toujours dessus! Mais on y fait plein de choses différentes! »

« Je pense que les parents peuvent au contraire être rassurés de nous savoir dans l’équipe techno, analyse Oni. Parce que nous savons bien nous servir de la technologie. Avec l’équipe techno, on crée justement des tutoriels. On a organisé un atelier sur la sécurité informatique, sur les données personnelles… »

Et je vous confirme qu’ils pourraient nous en apprendre. Ne tentez pas de taguer un de ces ados sur Facebook. Ils y sont introuvables. De vrais ninjas. Ce sont des masters des paramètres de sécurité.

Entre deux missions de réparation ou de débogage, l’équipe techno participe aussi à des concours de programmation de drones (pour le fun) et gère une formidable page Facebook de veille technologique. (Que je recommande fortement à tous les adultes. Allez-y! Maintenant!)

À voir la joyeuse bande arborer fièrement leur veste Équipe Techno, j’ai eu une pensée foudroyante pour la quadragénaire que je suis. (Celle qui a grandi dans le film de Breakfast Club) Coudonc, c’est-tu vraiment rendu cool d’être geek?

Ma question suscite plusieurs exclamations bruyantes. Victor répond d’un ton assuré: « Bien sûr que je me fais traiter de geek! Probablement parce que je m’intéresse à la technologie et que ce n’est pas un intérêt partagé par tout le monde ». Louis poursuit en riant : « On me traite de geek parce que j’aime bidouiller les ordinateurs. C’est vrai que j’ai déjà effacé au complet un système d’exploitation. Mais être geek, ce n’est plus péjoratif, je pense. »

Arnaud, vétéran, confirme le tout: « Je pense que les mentalités ont changé. Avant, le geek était dans le fond de la cafétéria. Mais ce n’est plus ça du tout. La technologie est en pleine expansion, il y a plein de nouveaux métiers intéressants. Nous sommes plus nombreux à nous y intéresser, c’est moins « anormal » qu’avant. Et puisque la technologie est maintenant partout, ben… notre connaissance est valorisée. »

Parlez-en au prof dont le TNI a planté. La revanche des geek? Peut-être. L’avantage aux jeunes ? Assurément.